La Mille et Deuxième nuit
La féerie continue
Né d’un bouillonnement d’idées et de talents, La Mille et Deuxième nuit présentée par Les Monts du Reuil le 31 mars à l’Opéra de Reims est un opéra-féérie tout neuf où s’entrecroisent l’art lyrique et le cinéma, les effets spéciaux d’hier et d’aujourd’hui, les époques et les cultures, l’Orient et l’Occident.
Dans le plus célèbre recueil de contes orientaux, Les Mille et Une nuit, Shéhérazade racontait chaque nuit au sultan une histoire sans fin qu’elle suspendait au matin pour le tenir en haleine et échapper ainsi à la mort vengeresse promise à toutes ses épouses. Jusqu’au jour où elle sécha. Panne d’inspiration. Péril imminent. Par bonheur, le sultan attendri par l’amour lui fit grâce de la vie. La suite, plusieurs auteurs occidentaux l’ont imaginée : Alfred de Vigny, Théophile Gautier, Edgar Poe, Joseph Roth… Et Jules Verne.
Jules Verne a embarqué des générations de lecteurs dans des voyages extraordinaires, autour du monde, au centre de la terre, à 20 000 lieues sous les mers, en ballon, dans la lune… On sait moins que ce passionné d’aventures et de sciences était aussi passionné de musique et qu’il lui est arrivé de donner à sa prose la forme d’une opérette.
Un cadeau du ciel
La Compagnie lyrique les Monts du Reuil, toujours active dans la recherche de trésors musicaux oubliés des XVIIIe et XIXe siècles, a ainsi mis la main sur le joli livret de La Mille et Deuxième nuit qu’il aurait commis à ses débuts. Hélène Clerc-Murgier et Pauline Warnier, co-fondatrices, y ont vu les prémisses d’un spectacle à inventer. Sauf que la partition signée par Aristide Hignard demeurait introuvable. « Alors nous avons cherché ailleurs et découvert grâce à Louison Costes qu’un certain Lucien Poujade avait composé sous le même titre un opéra-bouffe qui fut représenté en 1885… au Grand Théâtre de Reims. Un cadeau du ciel ! »
Il ne restait plus qu’à apparier les deux, sous réserve de quelques adaptations. « Le livret de Jules Verne était trop court et la partition de Poujade trop longue. »
À l’écrivain Pierre Senges, elles ont demandé de travailler sur le texte en l’étoffant. Dans l’ouvrage refondu, on retrouve une Shéhérazade toujours conteuse hors pair pour son sultan de mari, stratège, défendant plus que jamais la cause des femmes, mais aussi sa sœur complice et un serviteur zélé. Et le sérail s’enrichit d’un cinquième personnage créé de toutes pièces, Lazare Mérule, sorte de savant fou très drôle en qui s’incarnent à la fois Jules Verne et Georges Méliès. « Notre idée était de rendre aussi un hommage au pré-cinéma et en particulier à Méliès qui fut un génie au destin incroyable. » Et dont les films Le Voyage dans la Lune (adapté de Jules Verne) et Le Palais des mille et une nuits le reliaient presque naturellement au projet.
Couleurs chatoyantes
La Mille et Deuxième nuit façon Monts du Reuil est parcourue par la musique de Lucien Poujade, légèrement écourtée, réorchestrée par Thomas Guyot, augmentée d’un air de Bizet et piquetée de sonorités exotiques que l’on doit à Khalil Hentati. Sur les onze instrumentistes qui accompagnent les cinq comédiens-chanteurs, on trouve notamment des joueurs de oud, de kanoun et de nay. « On y tenait. Cela donne par moment une couleur orientale très particulière et très belle. » Les décors peints à la main par l’artiste tunisienne Farah Allègue, les costumes aux couleurs chatoyantes confectionnés par Albane Noël enveloppent la scène d’une atmosphère de beauté et de poésie. « Avec la scénographe Naelle Lamothe, nous voulions créer des tableaux du XIXe siècle qui évoquent l’Orient sans tomber dans le clinquant, le mauvais goût. Les choix des tissus sont très justes, très réussis. » Le tout mis en valeur par la lumière de Carlos Perez.
Ce que l’esprit a conçu, la mise en scène assurée par Louison Costes et Hélène Clerc-Murgier l’a grandi. Pour renforcer la féérie du spectacle, elles ont mobilisé toutes les ressources de l’imagination et de la technologie. Des surprises très visuelles attendent le public. Que peut-on en dire sans affadir les effets ? Au cours des trois actes, une lanterne magique, un insert du film de Méliès, un système vidéo de collage et d’animation d’images anciennes, des projections sur voile de tulle et des ombres chinoises vont produire des illusions d’optique, élargir l’espace, l’horizon, enluminer l’histoire… « Ce qui caractérise l’homme, c’est raconter des histoires qui vont nourrir l’imagination, si importante dans nos vies », considère Hélène Clerc-Murgier. « Et c’est vrai partout dans le monde, de tout temps, renchérit Louison Costes. Que ce soit à l’oral, par l’écrit ou par les images. Que ce soit pour apprendre, s’amuser, endormir les enfants… C’est universel ! »
lesmontsdureuil.fr
LA MILLE ET DEUXIÈME NUIT
VENDREDI 31 MARS À 20H30
Texte : Catherine Rivière
Nos autres
actualités
Aucun résultat
La page demandée est introuvable. Essayez d'affiner votre recherche ou utilisez le panneau de navigation ci-dessus pour localiser l'article.
