LE VOYAGE DANS LA LUNE

Décliné au futur antérieur

Bien avant la Nasa et Elon Musk, Offenbach a envoyé des Terriens sur la lune (déjà habitée) et mis en musique leur rencontre déconcertante et rugueuse avec la population locale. Cet opéra-féérie « d’anticipation » est proposé à l’Opéra de Reims les 11 et 12 mars 2023 dans une mise en scène particulièrement inventive et réjouissante, traversée de clins d’œil anachroniques.

Parmi la bonne centaine d’œuvres scéniques qu’il a produites, Offenbach a composé en 1875 Le Voyage dans la lune, un opéra-féérie qui emprunte à la veine fantastique de Jules Verne et dont le ton léger à la Feydeau cache une pique contre la société de son siècle. Le Palazzetto Bru Zane a reconstitué et réédité l’intégralité de cette partition. Génération Opéra a monté, avec ce matériau, un projet ambitieux en rassemblant plusieurs maisons d’opéra – seize en l’occurrence – pour offrir aux jeunes chanteurs lyriques autant de scènes où valoriser leur talent. Mais comment, de cette œuvre fondée sur des repères de science-fiction aujourd’hui dépassés, faire un spectacle qui parle au public du XXIe siècle et l’enchante aussi, tout en restant fidèle au grinçant et à la fantaisie d’origine ?

RÉFÉRENCE À MÉLIÈS

À la manœuvre, Olivier Fredj, le metteur en scène : «C’est vrai qu’Offenbach en avait fait un peplum gigantesque avec 80 choristes, 600 costumes et 22 décors et des effets de scène nouveaux. Garder la force du rythme, les 23 tableaux, les effets visuels, les ballets, sans renoncer à la critique sociale et à l’humour, c’était un énorme challenge, presque mission impossible mais finalement très réjouissant à faire ! » Le challenge a été relevé au prix de quelques adaptations (durée et distribution réduites, rééquilibrage entre parties dialoguées et musique…) et surtout grâce à une heureuse trouvaille dramaturgique : « J’ai voulu non pas rivaliser avec le spectaculaire de l’époque mais au contraire jouer sur l’imaginaire qu’on a enfant, montrer les ficelles. On a donc déplacé l’œuvre dans un studio de cinéma où se tournerait Le Voyage dans la lune, en référence au film du même nom que Méliès a fait en 1902. » Cette mise en abyme permet de justifier le décor unique, qui s’anime tout au long des 23 tableaux avec les images défilantes de Jean Lecointre.

DÉCORS ET COSTUMES COLORISÉS

Pour la direction artistique de la pièce, Olivier Fredj est allé chercher cet auteur-illustrateur dont l’univers et l’esprit satirique sont en phase avec le projet. «Nous sommes partis des photo-montages qu’il a créés, où tout était permis, pour travailler avec Malika Chauveau (scénographe et costumière) sur ce qui était réalisable, en s’appliquant à trouver des décors et des costumes qui soient le plus grotesque possible. » Exemple : des personnages féminins en Spontex géante, en aspirateur, en gant Mapa, en pelote de laine, en plante verte ou en abat-jour, façon de traduire visuellement que, sur la lune d’Offenbach, les femmes n’ont que deux fonctions: utiles ou décoratives… Tous les décors et les costumes sont en noir et blanc, jusqu’à l’acte 2 où ils se colorisent par la magie de la lumière et de la vidéo. Un clin d’œil à Méliès qui colorisait à la peinture les bandes de ses films. Quant à la mise en scène, articulée avec une grande précision, elle s’inspire de la comédie musicale pour les systèmes de changement de décor et les passages d’une scène à l’autre. Dans ce spectacle où il est question de rois, de prince et de princesse, c’est vraiment l’imagination qui est reine.


LE VOYAGE DANS LA LUNE
SAMEDI 11 MARS À 20H30
DIMANCHE 12 MARS À 14H30

olivierfredj .com
bru-zane.com
generationopera.fr

Texte — Catherine Rivière
Images — Marc Ginot

 

         

Nos autres
actualités

Aucun résultat

La page demandée est introuvable. Essayez d'affiner votre recherche ou utilisez le panneau de navigation ci-dessus pour localiser l'article.

* Tous les champs sont obligatoires.

 

L’Opéra se lit aussi !